La puissance de l’imagination

L’article suivant est paru dans l’édition d’Automne, numéro 63, de la revue Gateways. Gateways est éditée par la « Waldorf Early Childhood Association of North America » (WECAN). Cette revue est le journal professionnel pour ceux travaillant dans la petite enfance au sein de la pédagogie Waldorf. Elle paraît deux fois par an, au printemps et en automne et contient de nombreux articles fort intéressants.

Traduction de l’article La puissance de l’imagination

Ce qui suit est un extrait de la nouvelle édition de Nokken chez WECAN : « Un jardin pour les enfants », qui décrit et célèbre un remarquable programme intérieur-extérieur pour les enfants âgés de un à sept ans à Copenhague, au Danemark. Le pouvoir de guérison de la nature est un thème central du livre, et ici Helle Heckmann le relie avec des questions importantes autour de l’imagination, du jeu et des jouets.

La petite Johanne, âgée d’un an, est debout, regardant un arbre depuis environ dix minutes. Elle lève sa main lentement. Pointe l’index. Elle touche l’arbre délicatement, puis un peu plus courageusement, ensuite avec toute la main. Elle caresse l’arbre.

Karoline (également un an) regardait Johanne. Elle marche vers elle et caresse l’arbre, regardant toujours Johanne. Ensemble, elles rient. Elles courent loin de l’arbre, et reviennent le caresser encore, et encore, et encore.

Sans s’interrompre, elles passent une heure avec cette expérience. Voilà tout ce qu’est l’enfance : une identification avec l’environnement. Laisser le milieu naturel devenir une partie de soi-même. L’inchangeable, la sécurité, le toujours existant. Ceci, seule la nature vivante peut le donner.

« Avez-vous faim ? » La question est posée par Sarah, trois ans. Nous (y compris vingt-quatre enfants de un à six ans) sommes dehors pour notre promenade quotidienne au cimetière. L’automne se rapproche rapidement. Le vent souffle, rafraîchissant. Nous sommes tous bien habillés : beaucoup de vêtements de laine sous l’équipement de pluie. Sarah joue dans un peu de terre et de boue. Habilement, elle ramasse un morceau et le forme dans sa main.

Elle trouve une feuille qui s’adapte exactement comme un plat de service pour la boule de boue, un soupçon de cailloux et une plume complétant le plat. « Voilà ! », dit-elle sérieusement. « Voulez-vous une boisson avec cela ? » « Oui, s’il vous plaît ! », est la réponse. « Magnus, pourrais-tu maider pendant une minute ? » Magnus est occupé à mettre les feuilles sur un bâton. « Est-ce que cela doit être juste maintenant ? »

« Est-ce que cela doit être juste maintenant ? », répète Sarah, en me regardant dans l’expectative. « Non, je peux attendre jusqu’à ce que je l’ai fini de manger », répondis-je. Les enfants poursuivent leurs actions, sans être dérangés.

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Le loup vient – peut-être

 « Helle, Helle, viens jeter un oeil. » Asbjorn, cinq ans et demi, vient, le souffle court. « Nous avons vu quelques pistes, je pense qu’elles sont d’un loup ». Immédiatement, nous courons regarder les pistes. Plusieurs des enfants plus âgés sont sur leurs genoux qui étudient les grandes pistes de quelque patte. Ils bavardent avec impatience.

Les connaissances sont échangées entre les enfants. Finalement, ils font silence et se tournent vers moi. Qu’est-ce que je dois dire ? Je produis maintenant un conte sur le loup, qui n’est rien de plus que ce qu’il prétend être, et qui ne commente pas du tout les traces sur le sol.

Les enfants sont à l’écoute, les yeux sont tout à fait clairs, leurs oreilles sont dressées, leur bouche entrouverte. Autour de nous le vent souffle, les autres enfants grimpent les arbres ou batifolent autour, d’autres adultes coupent du bois, mais nous sommes loin d’eux. Quand l’histoire se termine, nous revenons au présent. Je laisse leur cercle, les enfants poursuivent leur exploration de la nature.

Qu’est-ce qui est si important pour que Sarah et Magnus puissent demeurer dans une flaque d’eau sous un arbre sur lequel le vent souffle, et dans une profonde concentration pour cuire un dîner ? Qu’est-ce qu’ils façonnent quand ils forment les boules de boue ?

Pour moi, c’est vraiment eux-mêmes, leur organes intérieurs. La boue, la terre, le sable, l’eau n’ont pas de formes définies ; ils ont la capacité de constamment changer. C’est exactement de quoi les enfants de trois à quatre ans ont besoin : une identification avec le monde environnant. Se salir est un signe de santé.

Les quatre éléments de la terre, de l’eau, de l’air et du feu sont les éléments de base avec lesquels les enfants sont nourris et à partir desquels ils se développent. Aucun jouet formé – qu’il soit de bois ou de matière plastique – ne peut entrer en compétition avec ces matériaux. Le sérieux avec lequel les enfants jouent, la profonde concentration, parlent pour eux-mêmes, et montrent comment ces « jeux » sont importants. Personne n’a besoin de se battre à propos de n’importe quoi ; il y a beaucoup de boue pour tout le monde.

La découverte de Asbjorn montre la curiosité des cinq à six ans envers le monde environnant. Ils veulent explorer, conquérir le monde, mais à leur propre niveau. Ils découvrent quelque chose, enquêtent, l’utilisent, le laissent, et le transforment.

Le processus est le plus important. L’imagination change la réalité – la réalité est changée par l’imagination. Si javais dit : « C’est une piste de chien, de toute évidence, pas une piste de loup », j’aurais gâché l’atmosphère et ruiné leur expérience. Je ne nie pas que c’est une piste de chien, parce que je ne mens jamais.

Je les enrichie en leur racontant quelque chose qui existe dans le même monde comme ils le font, dans le domaine de l’imagination, aux confins de la réalité. Bien sûr, les enfants savent que ce n’est pas une piste de loup, mais ce n’est pas ce quils demandent ce faisant. Ils voient si je suis en mesure de saisir leur monde, et d’être portée tout du long, si moi, une adulte, je peux nourrir leur imagination, si je peux créer une union dâme avec eux en leur racontant une histoire, et non pas une longue explication scientifique.

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Le simple et le vrai

Rencontrer les enfants où ils sont, sur le propre terrain de l‘enfant, c’est l’art de l’éducation. Comprendre que le jeu de l’enfant est le plus sérieux, parce qu‘à travers le jeu, l’enfant saisit la vie. En jouant, l’enfant imite le monde des adultes. Si les enfants nont pas la possibilité d’imiter les fonctions de base de la vie par le jeu, ils n’auront aucune possibilité de comprendre la vie.

Si Sarah n’expérimente pas la cuisine de sa mère (l’une des actions les plus importantes dans la vie), elle aura des difficultés à copier cette situation plus tard dans la vie. Elle n’aura aucune image intérieure de la façon de l’aborder. Si Sarah n’est pas autorisée à imiter ceci là où elle est – à savoir, dans la flaque d’eau -, elle nadaptera pas une expérience sensitive de base à son imitation. L’action importante de travailler l’intérieur dans une imitation extérieure de maman et de papa (l’environnement) est tout ce quest le jeu.

Tout ce qui est disponible sert comme un jouet, les simple matériaux non transformés peuvent faire tout ce que votre imagination souhaite qu’ils deviennent. Le bâton, qui est un cheval, est transformé en une épée et ainsi de suite. Les seules limites sont celles de l’imagination. Les meilleurs jouets sont les outils utilisés dans le ménage ou dans l’artisanat. Le simple, le vrai. Ils ne trompent pas les sens, et ils ont les qualités qu’ils promettent aux sens.

La plupart des jouets sont de l’abondance totale, une façon dont les parents et les grands-parents peuvent acheter l’affection de l’enfant quand ils ne disposent pas d’assez de temps à passer avec lui, ou qui sont achetés pour eux-mêmes ou pour leurs propres besoins.

L’abondance de la chambre des enfants doit être le pire cauchemar de l’enfant ou du parent. Je m’ennuie. Je n’ai rien pour jouer même si les étagères sont pleines à ras bord. Des collecteurs de poussière, un gâchis inutile. Où est l’amour pour l’ours en peluche, la poupée, la voiture ? Le présent qui a été donné dans l’amour et ne se noie pas dans l’abondance est difficile à trouver. L’enfant n’a pas besoin de jouets; les usines de jouets ont besoin de l’enfant !

Helle Heckmann est la fondatrice du Danish child care center Nokken et l’auteur de « Nokken : Un jardin pour les enfants » et de « Jardin de la petite enfance » (tous deux publiés par WECAN). Elle est active dans la formation des enseignants et le mentorat dans le monde entier, et a récemment lancé le site slowparenting.dk pour répondre aux besoins des parents aussi bien que des soignants.

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 J’ai adoré cet article que je trouve tellement riche de la force et de la puissance non seulement de l’imagination, mais, tout bonnement, de l’enfance.

Un proverbe plein de bon sens dit « Le mieux est l’ennemi du bien » et, que ce soit en matière de jouets ou dans bien dans d’autres domaines, on peut s’apercevoir qu’en tentant de rendre meilleure une chose, on la gâte. Moins les enfants sont dirigés dans l’accomplissement de leurs jeux, par des jouets dont la finalité évidente les limite, plus leur imagination s’active et véhicule sa force de guérison.

C’est un des messages que la pédagogie Steiner véhicule avec constance.

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Comme souvent, vous pouvez télécharger la traduction française de cet article en cliquant sur l’icône ci-dessous :

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Crédit photo Aurore de Hulster

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